Avis sur la biographie : Un père, de Sibylle Lacan
Il est possible que cette lecture m'ait été dictée par de vils sentiments, tel, par exemple, un inavouable désir de vengeance contre celui qui a visiblement décidé de me persécuter personnellement en se rendant de son plein gré totalement incompréhensible... Que ce génie, qui bouleversa la psychanalyse en France un peu à la manière d'un Carl Gustav JUNG (voir psychologie et alchimie) mais qui fit le choix délibéré de son opacité fut aussi un père médiocre me le rend peut être plus humain et du coup moins inaccessible...
Toujours est il que si Lacan et son oeuvre difficile encore et toujours déchainent les passions, entre rejet et fascination, si l'incendie qu'il alluma il y a plus de 60 ans au sein des psychanalystes français continue de brûler, ce n'est pas de cet homme là dont il est question ici.
Ce n'est pas de Lacan dont nous parle Sybille Lacan, d'une voix encore étouffée par le chagrin, la colère et le dépit, c'est du père qu'il fut pour elle, tragiquement absent. Et d'autant plus qu'il fut si présent à Judith, l'autre fille, la fille adorée, celle qui jamais ne porta son nom car elle était née d'un autre lit mais dont la photo, seule, trona sur la cheminée du cabinet du maitre, au 5 rue de Lille, durant des années.
Sibylle Lacan a souffert d'être (si peu) la fille de Jacques Lacan, d'être la fille d'une femme déjà abandonnée, elle a souffert de n'être pas la belle et brillante Judith, et à la lecture de ce très court récit, fait de bouts épars mais d'une rare intensité, on comprend que ce chagrin d'amour n'est pas fini, que Sibylle sans doute aura été la femme d'un seul homme, la femme d'une seule et longue peine, et nul doute que pour un autre amour la place jamais ne se sera libérée, Sibylle sans fin reste la femme interminablement délaissée d'un homme toujours déjà perdu : son père.